Juillet 1982, Cimetière du Père Lachaise, Paris
La photographie n'est pas exactement datée mais c'est l'été, le début de l'été et des vacances.
Comme chaque année - en réalité il faudrait presque écrire "chaque jour" - la fréquentation de la tombe de Jim Morrison vit un "pic de fréquentation"... je peux donc dire que la date cette photographie avoisine le 3 juillet 1982. Onze année après sa disparition, un rituel s'est installé pour les voyageurs de passage.
Le buste est encore là, placé en 1981 il sera volé en 1988... la bouteille de Sidi Brahim aussi et puis il y a encore des fleurs et d'autres objets glanés sur les sépultures avoisinantes.
De cet endroit on entend très très faiblement la rumeur du boulevard de Ménilmontant. Quelques bavardages, des chuchotements parfois, viennent accompagner un air de guitare, quelques paroles de chansons et plus exceptionnellement un air de banjo ou un morceau d'anthologie s'échappant d'un lecteur de K7.
Le temps passe, mais à dire vrai il ne se passe rien.
Quelques années plus tard l'atmosphère changera. L'administration recadrera ce beau désordre qui ne faisait de mal à personne. Surveillance permanente, stridence des coups de sifflet pour réprimander celui qui se serait assis au mauvais endroit, à l'ombre des frondaisons, buste remplacé par une stèle portant une épitaphe bien sentie, "KATA TON ΔAIMONA EAYTOY", qui ne dit rien à personne.
Cette photographie a plus de vingt trois années derrière elle. Début juillet, enfin je pouvais aller et venir sans contraintes professionnelles, quelques jours plus tard je partirai au Portugal. Jusqu'à la mi-août tout irait bien. Après cela deviendrait plus difficile, beaucoup moins fun... Ce schéma-là se répèterait jusqu'en l'an 2000 où le jour de la rentrée, je ne rentrerai pas. Et il n'y aurait plus jamais de "rentrée"...